Le 20 mars 2023, Jean Burolleau a pris son dernier envol.
Né en 1926, Il a consacré sa vie à l’aéronautique. Entré au prestigieux CEV (Centre d’Essais en Vol) en 1956, en tant qu’expérimentateur d’essais (on dirait aujourd’hui ingénieur navigant d’essais) il a participé à de nombreuses campagnes d’essais de prototypes, dont certains allaient connaître des développements industriels, contribuant ainsi au renouveau de l’industrie aéronautique française, quelquefois au péril de sa propre vie.
Tel fut le cas le 04 mai 1961, lors d’un vol d’essai avec le prototype d’une machine fabriquée par Morane-Saulnier qui allait former ensuite un nombre incalculable de jeunes pilotes français et étrangers : le MS 880 « Rallye ».
Laissons Jacques Noetinger, l’historien des essais en vol auteur de plusieurs ouvrages, conter cet épisode dramatique :
« Le pilote (Jean Person) met l’avion en vrille et, sans problème, l’arrête. C’est en suite une remontée à 6500 pieds. Nouvelle mise en vrille, mais cette fois l’avion se lance dans une sarabande à la tendance d’un tour en quatre secondes, les commandes sont inefficaces, le moteur cale.
Remis rapidement en route avec la puissance au maximum, le Rallye ne bronche pas.
Depuis le MS 500 (l’avion observateur) un message jaillit : Sautez !
L’altitude s’amenuise. Person, toujours calme, juge venu le moment critique et décide : on saute. Person, maître à bord, laisse sauter Burolleau en premier, après avoir fait glisser la verrière.
L’altitude est de 600 mètres. L’expérimentateur réussit, non sans difficultés, à sortir de l’appareil. Un instant plus tard, le parachute s’ouvre. Person, lui, n’a pas sauté. Tente-t-il encore de sauver le prototype ? A-t-il été étourdi par ce mouvement giratoire prolongé ? Nul ne le saura jamais… »
Beaucoup, et on peut les comprendre, auraient cherché une autre orientation, mais pas Jean, qui poursuivit inlassablement sa carrière chez le constructeur après avoir quitté le CEV.
Même à la retraite, cette passion était resté intacte. Habitant La Baule, il a continué à voler durant des années, comme instructeur, formant ainsi des générations de pilotes sur le terrain d’Escoublac.
J’ai eu, bien des années plus tard, l’immense privilège de voler avec lui, accompagné de Jean Caillard, autre grande figure des Essais en Vol. Installé moi-même sur la banquette arrière de mon propre Rallye, je mesurai cet insigne privilège qui m’était donné d’être piloté par ces grands anciens qui avaient tant contribué au renom des ailes françaises et combien je leur devais, à eux qui avaient risqué leur vie pour que nous, les navigants puissions exercer notre métier en toute sécurité.
Bon vol, Jean